Libérées
Titiou Lecoq

Mon féminisme est désormais de notoriété publique, vous n’êtes pas sans savoir que j’ai créé à ce sujet un club de lectures. C’est d’ailleurs dans le cadre de ce club que les éditions Fayard m’ont proposé de recevoir ce livre, que j’ai pu faire gagner à 10 d’entre vous. Un grand merci à Fayard pour cette lecture vraiment riche et passionnante.

Le résumé

« Un jour, je me suis demandée : pourquoi est-ce moi qui ramasse les affaires qui traînent ? Je n’ai trouvé qu’une seule réponse. Parce que je suis une femme qui vit avec un homme et deux enfants et que, conséquemment, les corvées, c’est pour ma gueule.
Être une femme, ce n’est pas seulement l’idéal de minceur et de cheveux qui brillent, c’est le souci permanent des autres et du foyer, c’est être sans cesse ramenée à la saleté, aux taches, à la morve. L’égalité serait déjà là, mais les femmes conservent la conviction intérieure qu’elles doivent s’occuper de tout et tout le monde, et d’elles en dernier, s’il reste cinq minutes à la fin de leur triple journée.
Cette féminisation de la sphère privée implique une autre conséquence : l’espace public est toujours masculin. Peut-on se dire égaux quand la moitié de la population adapte ses vêtements en fonction des transports et fait attention à ne pas être seule la nuit dans la rue ? Et si le combat féministe devait encore et toujours se jouer dans la vie quotidienne de chacune et chacun, chez soi, dans sa propre maison, devant le panier de linge sale ?

Mon avis

Ahhh… le ménage. Voilà une discussion qui revient souvent lors de mes soirées entre copines. Et surtout pour celles qui vivent avec leur mec : elles qui se tapent tout le ménage, tous les jours, toutes les semaines, qui n’ont de cesse de réclamer à leur mec une petite participation, et dont le mec répond inlassablement « bah il suffit de demander ! ». Eh bien, flash info les gars : NON. En fait, il ne suffit pas de demander. Vous avez deux bras, deux jambes, et un cerveau, comme tout le monde, et vous êtes donc capables de penser par vous-même à aspirer le sol ou faire la lessive. Et oui ! Ca semble incroyable, et pourtant c’est vrai.

C’est d’une simple chaussette sale déposée sur le sol, à proximité du panier à linge sale, que débute la réflexion de Titiou Lecoq. Une réflexion qui nous mènera à explorer les différences qui régissent les relations entre les hommes et les femmes, et tout y passe : le harcèlement de rue, le manspreading, la charge mentale… Cette chaussette peut donc paraître anecdotique, mais elle est en réalité très révélatrice. Elle agit comme une sorte d’iceberg : on en voit la partie émergée, et l’auteure part à la recherche de tout ce qu’elle dissimule en réalité.
Le point de départ est donc très pragmatique et factuel. Pour construire sa réflexion, on débute du constat que le ménage est une tâche qui incombe majoritairement aux femmes. Il n’est pas question de dire que les hommes ne font rien, non, mais les hommes font moins que les femmes. Et si l’on pousse encore davantage la réflexion, on en vient à cette fameuse question de la charge mentale.

Alors, honte à moi, je ne connaissais pas cette expression. Mais heureusement, grâce à Titiou Lecoq, le mal est réparé, j’ai donc pu mettre un mot sur cette fameuse tendance qu’ont les femmes à tout planifier pour leur vie de famille, quand les hommes, eux, oublient ou se reposent entièrement sur leurs compagnes. (comment font-ils lorsqu’ils sont célibataires d’ailleurs ?)
La charge mentale, c’est ce poids que portent les femmes et qui consistent à penser à tout, tout le temps, même au boulot, pour que leur vie de famille et leur vie de couple se déroule au mieux. Qui parmi nous n’a jamais eu cette réflexion en pleine réunion de boulot : « Ah, il faut que je pense à prendre du pain pour ce soir » ou « Je dois impérativement programmer ce rendez-vous chez le dentiste » ? Eh bien, les hommes. Les hommes ont tendance à moins y penser et à davantage se reposer sur les femmes. Et même lorsque les hommes le font, ce sont les femmes qui y pensent et le leur rappellent. Oui, bien sûr, c’est schématique et il y a des exceptions, mais quand même, moi dans tous les couples que je connais, c’est comme ça que ça se passe.

Dans le déroulement du livre, j’ai un peu décroché lorsque Titiou Lecoq s’attache à la décoration – le rôle joué par instagram – et l’étude sociologique qui en découle. Mais heureusement, mon intérêt est revenu vers la fin, lorsqu’elle aborde l’inévitable question du harcèlement de rue et de la place de la femme dans l’espace public. Une chose m’a beaucoup marquée notamment, c’est cette idée selon laquelle la femme qui cherche à se faire discrète le soir lorsqu’elle rentre tard se comporte comme une potentielle victime, et deviendra une proie plus facilement repérable. Je n’y avais jamais songé auparavant. Mais il est vrai que marcher avec assurance dissuade les harceleurs de rue, j’en ai moi-même fait l’expérience depuis quelques années (au bout de 5 ans à Paris, il faut bien commencer à faire évoluer son propre comportement !).
Rien à voir, au passage, mais cela me rappelle cette anecdote que je vous ai partagée sur Twitter la semaine dernière : alors que je sortais d’un spectacle avec une amie, nous nous faisons suivre par un homme étrange. Nous montons dans un taxi et lui expliquons la situation. Sa réponse ? « Vous n’aviez qu’à discuter avec lui, il était peut-être amoureux de vous ! » Donc, en fait, n’importe qui peut nous suivre et nous faire peur dès lors qu’il a des « sentiments » pour nous ? Et vous pensez qu’on peut développer des sentiments pour quelqu’un que l’on a croisé 2 minutes plus tôt sans lui avoir adresser la parole ? Cette réflexion est totalement empreinte de la connerie humaine d’un homme qui ne se sent pas concerné par une peur purement féminine, tout simplement parce que cet homme n’y sera jamais confronté. Effarant.

Il y aurait vraiment beaucoup à dire sur le sujet du féminisme, beaucoup de réflexions à faire naître, beaucoup de gens à sensibiliser, et une large éducation à dispenser. Je ne compte pas vous faire un compte-rendu détaillé du contenu de ce livre, Titiou Lecoq le fait bien mieux que moi et chaque mot compte, c’est pourquoi je vous le recommande très chaudement.

En conclusion

Vous l’aurez compris, ce court livre est riche et porteur d’une réflexion à laquelle nous devrions tous être sensibilisés un jour. C’est un livre très intéressant que je compte bien offrir à mes amies. Merci Titiou Lecoq pour toutes ces recherches et cette réflexion, votre livre est très clairement un manifeste que j’aurais aimé pouvoir écrire. Un livre à lire par tous !

La Parisienne