Si la lune éclaire nos pas,
Nadia Hashimi

L’an dernier, ma lecture de La Perle et la Coquille avait été un véritablement coup de foudre. J’avais eu beaucoup de mal à me remettre de cette lecture coup de poing, qui m’avait laissée dans un état second. Ce livre incarnait à lui seul toutes les raisons qui font que j’aime autant lire. J’étais évidemment très impatiente de découvrir le nouveau titre de l’auteure, car je savais que mon ressenti serait le même. Et je ne m’étais évidemment pas trompée.

Le résumé

Kaboul est entre les mains des talibans. Depuis que son mari, considéré comme un ennemi du régime, a été assassiné, Fereiba est livrée à elle-même. Si elle ne veut pas connaître le même sort que son mari, elle doit fuir. Après avoir vendu le peu qu’elle possède, elle entreprend un voyage périlleux avec ses trois enfants, dans l’espoir de trouver refuge chez sa sœur, à Londres. Comme des milliers d’autres, elle traverse l’Iran, la Turquie, la Grèce, l’Italie et la France. Hélas, les routes de l’exil sont semées d’embûches : que devra-t-elle sacrifier pour de meilleurs lendemains ?

Mon avis

Parfois, aimer un roman fort d’un auteur particulier est suffisant pour déclencher un amour sans borne pour l’auteur en question. Une seule lecture nous permet de savoir que nous suivrons l’auteur de près, parce qu’il a su nous toucher, parce qu’il parle de sujets qui nous tiennent à coeur, parce que nous aimons sa plume… Nadia Hashimi fait pour moi partie de ces auteurs-là. Ces auteurs pour lesquels je serai au rendez-vous, à chaque livre.

J’avais été totalement déboussolée et secouée par ma lecture de La Perle et la Coquille, et je m’attendais à être tout autant bouleversée avec Si la lune éclaire nos pas. Eh bien, laissez-moi vous dire que ce fut le cas.
Dans ce nouveau roman, l’auteure s’attache à nous retracer le parcours d’une famille de migrants, ne pouvant plus supporter l’oppression des Talibans à Kaboul, et fuyant vers l’Europe dans l’espoir d’une vie meilleure. Les pistes sont pourtant brouillées au début, qui nous plongent dans l’histoire de Fereiba, cette jeune femme très décidée à aller à l’école malgré la désapprobation de sa belle-mère Kokoghul. J’ai aimé cette force de caractère d’une enfant bien décidée à ne pas se laisser faire, à ne laisser personne lui voler son avenir, à se donner toutes les chances pour s’instruire. Dès le début de l’histoire, l’injustice est là, sous-jacente, pour cette Fereiba qui ne subit pas le même sort que ses soeurs.

J’ai par la suite vu mon coeur se serrer pour Fereiba, lors de son rapprochement avec le jeune homme du verger. On a toujours envie de croire à des événements heureux malgré les indices semés par l’auteure, surtout lorsqu’il s’agit d’un destin aussi tragique. Mais Fereiba nous apprend que les malheurs qui nous arrivent sont parfois bénéfiques pour ce que Dieu nous réserve. Notre destin est simplement ailleurs. J’ai aimé cette sagesse qui intervient par la suite, à travers le regard que l’héroïne jette sur son passé.

Le parcours de Fereiba et ses enfants est semé d’embûches. Bien évidemment, en quittant l’Afghanistan, l’espoir de trouver la liberté et la sécurité sont omniprésentes. Et c’est évidemment une énorme désillusion à laquelle sont confrontés les membres de cette famille lorsqu’ils découvrent de quoi le quotidien des réfugiés est fait : travailler pour une misère, vivre dehors, dans la peur des forces de l’ordre, voler pour se nourrir, obtenir des faux papiers… En chemin, ils croiseront d’ailleurs de nombreux autres personnages au parcours similaire.

J’étais loin d’imaginer jusqu’où ce roman me porterait. Jusqu’aux portes de mon propre pays, jusque la région où je suis née. Pour une fois, nous ne voyons pas « notre » réalité à travers nos yeux de citoyens français, nous vivons LEUR réalité, celles de ces migrants entassés dans une jungle, espérant simplement échapper à un pays où les droits de l’homme n’existent plus.

Et comment vous dire à quel point j’ai adoré cette fin ! Tant de tensions, tant de suspense, tant d’épreuves et d’obstacles pour en arriver à cette fin… cette fin que je n’avais vraiment pas vue venir et qui est tout simplement la conclusion parfaite pour Salim. Car la peur ne nous quitte jamais, rien n’est joué d’avance, le danger guette toujours. Car tout ne s’arrête pas là, c’est à nous, lecteurs, de reconstituer le chemin, en tenant compte de ce tout ce qui précède. Fin heureuse ou tragique ? Nadia Hashimi se refuse à trancher, donnant là la parole à tous les migrants à la fois, ceux qui ont connu un dénouement dans la mort et la douleur, et ceux qui ont eu plus de chance…

Derniers mots : si je devais malgré tout choisir entre la Perle et la Coquille et Si la lune éclaire nos pas, je pense que ma préférence pencherait malgré tout pour le premier. Mais les deux sont tout aussi indispensables l’un que l’autre, alors n’hésitez pas à compléter votre collection. Votre bibliothèque ne s’en portera que mieux !

En conclusion

Ce roman est dense, il apporte un regard authentique sur la réalité que traversent les migrants d’Afghanistan venus chercher un avenir meilleur dans un pays qui respectera leurs droits les plus élémentaires. C’est un roman incroyable qui vous fera passer par une multitude d’émotions, et dont le souvenir s’imprégnera pour longtemps dans votre mémoire. Comment oublier de tels destins, comment oublier une telle douleur, une telle vie qui est pourtant celle de nombreuses personnes qui résident actuellement illégalement dans notre propre pays ? Lorsque l’on referme ce genre de romans, nous ne sommes plus vraiment les mêmes. Nadia Hashimi signe encore un roman merveilleux, bouleversant, indispensable, à lire impérativement.

La Parisienne