Une évidence
Agnès Martin-Lugand

Pour moi, chaque nouveau roman d’Agnès Martin-Lugand est un pari. Celui-ci fut-il réussi ? Je remercie les éditions Michel Lafon pour cette lecture.

Le résumé

Reine mène une vie heureuse qu’elle partage entre son fils de dix-sept ans et un métier passionnant.
Une vie parfaite si elle n’était construite sur un mensonge qui, révélé, pourrait bien faire voler son bonheur en éclats…
Faut-il se délivrer du passé pour écrire l’avenir ?

Mon avis

Vous le savez peut-être si vous suivez régulièrement mon blog, j’entretiens une relation très conflictuelle avec les romans d’Agnès Martin-Lugand. Après mon énormissime coup de coeur pour Les Gens, je n’ai jamais réussi à retrouver cette flamme qui avait fait vaciller mon coeur. J’ai même été un peu plus en colère à chaque nouveau roman, tant j’avais l’impression d’éternellement relire la même histoire. Pour tout vous dire, je ne comptais pas découvrir Une évidence, mais ce sont les nombreux avis des personnes que je suis sur les blogs et les réseaux sociaux qui m’ont poussée dans mes retranchements, et j’ai pris le risque d’une nouvelle déception.

Ce roman est une surprise. Je l’ai aimé. Et détesté. Il a presque embarqué mon coeur. Avant de me faire soupirer de frustration, pour ne finalement m’apporter qu’une déception encore plus grande que toutes les précédentes. Laissez-moi vous expliquer…

Le début de ce roman a profondément fait résonner plusieurs choses en moi. Il y avait comme des échos de ma vie personnelle, en raison de son sujet. Et puis, l’intrigue se déroule entre Rouen et St Malo, deux villes que je connais extrêmement bien…
J’ai beaucoup aimé la relation de Reine et de Noé. J’ai aimé ce mensonge (c’est horrible à dire), car j’ai trouvé que cela donnait du relief aux personnages. Bon, il n’en demeure pas moins que certains (et notamment Pacôme) sont un peu trop parfaits à mon goût, mais ça, j’aurais pu vivre avec. Peu importe, j’ai adoré découvrir cette histoire, enfin j’avais l’impression que l’autrice se renouvelait, qu’elle me proposait autre chose, une histoire que je n’avais pas déjà lue.

Pour une fois, j’étais prête à jouer le jeu et à fermer les yeux sur les quelques facilités de l’intrigue. On sait d’emblée comment les romans d’Agnès Martin-Lugand se terminent (bien), et vraiment, cette fois, ça ne m’a pas dérangée. Parce que j’ai trouvé qu’elle prenait bien le temps de décrire les pensées de Reine, d’expliquer son état d’esprit. On ne la juge pas, on la comprend. Et on arrive même à comprendre les réactions des gens qui l’entourent.

Et puis… et puis Noé passe son bac. Il reste une centaine de pages. Et là tout déraille.
Vous n’imaginez même pas ma colère en lisant cette fin. D’un seul coup, j’ai eu l’impression que l’autrice se précipitait pour conclure en refermant soigneusement chaque porte qu’elle avait ouverte. Mais pour quelle raison ??? Certaines choses PEUVENT rester en suspens ! Et laissez-moi vous dire que j’aurais préféré qu’elles le restent, plutôt que de lire ça…

Attention spoilers, à ne lire que si vous avez lu le roman :
Déjà, je n’ai pas de mots pour vous décrire ma colère quand j’ai compris que Reine allait finir avec Paul. On nous fait croire à leur amitié indéfectible pendant 300 pages pour au final nous expliquer que, ah ben non en fait, l’amitié homme-femme n’existe pas, il faut FORCÉMENT qu’ils finissent ensemble ? Et qu’ils se marient en une phrase, comme ça, sans plus de détails. Comme si une femme célibataire ne pouvait simplement pas être heureuse. Comme si le couple était un Saint Graal, une fin en soi. C’est tellement contraire à ce roman justement, à ces personnages qui s’y sont toujours refusés… Du grand n’importe quoi à mes yeux.
Et puis, quel besoin de faire revenir Pacôme pour le faire mourir ? Une seule explication possible pour moi : pour que Reine puisse profiter librement de son histoire avec Paul. Pour que les lecteurs n’en veuillent pas trop à l’autrice. Mais justement, cette fin avec Pacôme en Inde, cet au revoir tragique, c’était ÇA l’une des forces de ce roman ! C’était ÇA précisément qui le rendait différent ! Pourquoi, pourquoi, pourquoi avoir cédé à cette facilité !
Fin des spoilers.

Alors oui, en refermant ce roman et en écrivant cette chronique, je suis en colère. Parce que j’ai l’impression que l’autrice n’a pas su prendre de risques, encore une fois. Elle avait tout pour construire un très beau roman, et elle y était entièrement parvenue… Mais il a fallu qu’elle gâche tout par une centaine de pages qui m’ont profondément déçue. Quel besoin de conclure de cette façon ? Satisfaire le lecteur ? Permettre à l’héroïne d’être « pleinement » heureuse ? On peut être heureux de bien des façons… et là, pour moi, ces dernières pages étaient superflues, bâclées, inutiles.

En conclusion

Pour la première fois depuis la création de ce blog, je ne sais pas comment synthétiser mon avis sur ce roman. Je pourrais vous encourager à le découvrir pour tous les aspects qui m’ont énormément plu, mais j’ai été tellement déçue par cette fin expédiée et bâclée que non, définitivement, je n’ai pas envie de vous recommander ce qui fut une énorme déception pour moi. Je suis frustrée, car j’ai la sensation que l’autrice n’a pas su s’arrêter à temps. Et malgré tout le bien que j’ai pensé des trois quarts de ce roman, je crains malheureusement de ne retenir que la fin. Quel dommage…

La Parisienne

De la même autrice :
Les Gens heureux lisent et boivent du café
La vie est facile, ne t’inquiète pas
Entre mes mains, le bonheur se faufile
J’ai toujours cette musique dans la tête
A la lumière du petit matin